top of page
  • Photo du rédacteurITER

La Maçonnerie des vrais amis.


Le cérémonial de toutes les sociétés paraît toujours ridicule quand on n’en cherche pas l’esprit. Abbé Robin, (1779)


C'était pas des amis de lux’ Des petits Castor et Pollux Des gens de Sodome et Gomorrhe Sodome et Gomorrhe C'était pas des amis choisis Par Montaigne et La Boétie Sur le ventre, ils se tapaient fort Les copains d'abord

Il est possible que Brassens ait voulu affirmer que cette amitié était virile et ne relevait pas d’homosexualité, ou que Sodome et Gomorrhe soit le symbole de la faillite de l’amour durable, ce que n’est pas l’amitié.

C’est à travers les mémoires, des journaux intimes et des correspondances, du XVIe au XIXe siècle. « Évocations de l’amitié parfaite » Ce modèle idéal, s’est épanoui à la Renaissance, mais que Montaigne et La Boétie n’ont commencé à incarner qu’à partir des Lumières.


Un peu d’Histoire

Un premier regard sur différentes sources confirme aisément que l’amitié se trouve au cœur de l’identité maçonnique.

Pendant tout le siècle, l’idiome « Langue envisagée comme ensemble des moyens d'expression propres à une communauté » de l’amitié prédomine dans le lexique de l’Art Royal. Les Frères ornent leurs loges des noms comme « Amitié », « Amitié Parfaite », « Centre des Amis », « Vrais Amis », « Amis Parfaits » etc.

Presque tous les textes du début de la Franc-maçonnerie accordent une place centrale à l’amitié comme facteur de cohésion. »

Même importance reconnue à l’amitié dans les discours publiés à la fin des années 1740 qui déclarent que « la maçonnerie est un asile consacré à l’amitié » et que « tout maçon doit être nécessairement bon ami ».

Un maçon d’Épernay tenait également dans sa possession un poème dédié à la fraternité qui décrit les Maçons comme « nouveaux mais vrais amis ».

À travers le siècle, l’entretien de l’amitié demeure comme la ferme ambition de la sociabilité maçonnique, comme explique l’astronome Jérôme Lalande dans un discours de 1779 : « Je vais, mes chers Frères, vous entretenir sur l’excellence de la maçonnerie... C’est elle... qui fait naître cette politesse sans fard... Elle est mère de l’Amitié... tout fait ici voir le retour de ces temps heureux, où les hommes unis par les liens d’une amitié fraternelle, ne connaissaient point les distinctions introduites depuis par l’ambition, l’orgueil et la fortune. » (1)


1766 Lalande « Loge des Sciences »


La Franc-maçonnerie est pourtant un ordre initiatique fondé sur la fraternité, les textes constitutifs insistent sur ce point.


Les Constitutions d’Anderson, par exemple, posent comme règle fondamentale :

« Vous cultiverez l’amour Fraternel qui est la base, la pierre angulaire, le ciment et la gloire de notre confrérie ».

De même, les principes généraux précisent :


« La Franc Maçonnerie à pour devoir d’étendre à tous les membres de l’humanité les liens Fraternels qui unissent les Francs-Maçons sur toute la surface du globe. »


Martin LUTHER KING, disait :

« Nous devons apprendre à vivre ensemble comme des frères, sinon nous mourrons ensemble comme des idiots. »


Fraternité et Amitié, quelle différence ?

La Fraternité

Du latin fraternitas, qui désigne les relations entre frères, entre peuples, la fraternité est, selon le Petit Larousse illustré 2016, le « lien de solidarité et d'amitié entre des êtres humains, entre les membres d'une société ».

C'est lors de la Révolution Française que cette notion est entrée dans le langage courant : entre citoyens, le bonjour d'alors se dit « Salut et Fraternité ». Pour autant, elle est absente de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen de 1789.

Mais lors de la Fête de la Fédération, le 14 juillet 1790, à l'occasion du premier anniversaire de la prise de la Bastille, La Fayette, commandant de la Garde Nationale, la consacre lorsqu'il prête serment : « Nous jurons de demeurer unis à tous les Français par les liens indissolubles de la fraternité. » Il faudra attendre 1848 et la constitution de la Deuxième République pour que cette valeur donne naissance au triptyque Liberté, Égalité, Fraternité.

Mais alors, qu’est-ce que la fraternité ?

La fraternité est une valeur dynamique : la fraternité se vit, se construit, se cultive. Elle nécessite constance, vigilance, effort, persévérance. Elle porte en elle le progrès humain, elle permet de répondre à toutes les épreuves et de dépasser toutes les divisions.

La fraternité est aussi une promesse : celle de l’unité, celle d’une société ordonnée, paisible, prospère et harmonieuse. L’idéal de fraternité porte donc en lui la cohésion sociale et le bonheur de vivre ensemble.

La fraternité, c’est l’acceptation de l’autre tel qu’il est, dans un climat de tolérance, menant à une amitié profonde et sincère.

Être fraternel, c’est consentir librement à l’obligation de secourir et d’aimer ses frères, tous ses frères. Cet amour de l’autre nécessite le don de soi et l’effacement du « moi ».

Jacques Guilhaumou rappelle la devise imputée par les thermidoriens aux partisans de la Terreur : « la fraternité ou la mort », selon l'adage « Sois mon frère ou je te tue » ; cette fraternisation peut être pratiquée par un « ensemble de moyens en vue d'établir ou de resserrer les liens d'une étroite union ».


Guilhaumou, Jacques

Directeur de recherche honoraire au CNRS en Sciences du Langage.


L’Amitié

L’ami est absolument indispensable au bonheur pour Aristote. Il est absurde, pour lui, de faire de l’homme heureux un solitaire : « Qui choisirait de posséder tous les biens de ce monde pour en jouir seul ? ». La vie de l’homme heureux ne saurait manquer d’être agréable, ce qui est bien plus difficile à réaliser quand on est seul que quand on est entouré d’amis.

Sans compter qu’on se prive alors autant d’exercer sa propre bonté que de l’exemple inspirant de la fréquentation des gens bien. Dès lors, si on se souvient que pour Aristote, le bonheur se réalise dans une activité bien pensée, l’amitié se révèle en être un domaine d’application par excellence.

L’amitié est un sentiment d’affection ou de sympathie d’une personne pour une autre, ou entre plusieurs personnes qui ne se fonde ni sur la parenté, ni sur l’attrait sexuel et par extension, désigne les relations qui en résultent. Il y a dans la notion d’amitié, un lien intime que se créé dans le cadre de relations de personne à personne, un accès privilégié à la connaissance personnelle et intime de l’autre.

Jules Renard, dans son « Journal », va même jusqu’à définir l’amitié comme le mariage de deux êtres qui ne peuvent pas coucher ensemble.

« On ne juge pas un ami, on le supporte tel qu'il est. » Jules Simon (1814-1896)



Fraternité et Amitié : deux notions qui se ressemblent


Amitié et fraternité caractérisent les liens reliant plusieurs individus, et toute organisation regroupe, quant à elle, des individus en relation par leur volonté d’atteindre un objectif commun. Amitié et fraternité peuvent donc exister et coexister, mais si l’amitié est entière, ce n’est pas nécessairement le cas de la fraternité, plus proche en cela de la tolérance.

D’abord, le lien d’amitié ou de fraternité qui unit différentes personnes se traduit souvent par le partage de valeurs morales et de règles communes, soit liées à l’éducation, soit provenant du choix même des individus.

Ensuite, la réciprocité est évidente. L’amitié n’est jamais à sens unique, sans quoi le lien qui la constitue ne prend pas le même sens. De la même façon, je suis le frère d’une personne car elle me reconnaît comme telle, et cette reconnaissance est mutuelle.

Fraternité et Amitié font largement appel à des formes de solidarité indéniables ainsi qu’à la tolérance, qui, si elles sont graduelles en fonction des individus, sont généralement plus présentes que dans d’autres formes d’associations.

Enfin, la différence entre la « simple amitié » et « l’amitié fraternelle » réside aussi dans les sentiments que l’on éprouve.

Pour un ami que nous considérons comme un frère ou une sœur, il s’agit clairement d’amour. Nous lui faisons entièrement confiance, alors qu’il se pourrait même que l’on ne puisse pas en dire autant de nos vrais frères et sœurs. Pourquoi ?

Certainement puisque justement, nos amis, au contraire de notre famille, nous les choisissons, comme le dit le dicton. Pour finir, rappelons cette citation de Montesquieu, philosophe qui avait déjà réfléchit à la question : « Ce ne sont pas seulement les liens du sang qui forment la parenté, mais ceux du cœur et de l’intelligence ».

Là où l’Amitié peut être brisée par une trahison, ou une déception, la Fraternité, elle, résiste et perdure. Car même si la Confiance est peut-être altérée et que les points de vue divergent, l’Amour fraternel se construit sur la pierre angulaire de notre ancienne fraternité.


Mes amitiés les plus fraternelles...



GL 2022/10


(1) Inspiré De l’honnête homme à l’homme sensible « Kenneth Loiselle »

S’inspirer des œuvres des autres permet de nourrir son imaginaire...


133 vues0 commentaire
bottom of page