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H...m est-il la figure du Christ ?



Notre Très Cher Frère Gérard Lefèvre nous livre une réflexion personnelle sur le mythe du 3ème grade à tous les rites …


Jésus et H…m désigné ci-après par « le Maître mythique » sont des éléments clés d’une connaissance impliquant la croyance en Dieu[1]. Jésus pour les Chrétiens est le fils de Dieu et le premier point de notre règle maçonnique, est la foi en Dieu, Grand Architecte de l’Univers. Le Maître mythique et le Christ, bien que très différents, sont tous les deux des initiés. L’initiation est l’admission à une vie supérieure qui est considérée comme une seconde naissance, une régénération. Être initié, c’est mourir pour renaître. L’Homme lutte contre sa mort et tend à la repousser, ce qui fait naître le mythe de la résurrection. Chaque nouveau Maître fait l’expérience du retour à la vie à travers un nouvel homme. C’est l’accès à l’aspect spirituel de la destinée humaine et la nécessité d’être initié.

Dans la légende et le mythe du Maître, j’ai l’impression que le Christ apparaît en filigrane comme une prémisse de sa venue, de son histoire, même si la mort du Maître mythique et celle du Christ associée à sa résurrection ne résonnent pas de la même façon. Or le Maître mythique du 3ème grade, à tous les rites, n’est pas un Dieu sauveur qui meurt pour sauver l’humanité. Il est l’exemple du juste qui triomphe du trépas et de la corruption, symbole de la destinée réservée au Maçon qui respecte ses obligations et qui remplit ses devoirs. Il y a en même temps quelques étonnantes similitudes qui apparaissent dans les rituels : le Maître mythique était porteur d’une parole et d’un secret qui lui valent la mort ; il ne ressuscite pas comme tel mais il ressuscite au moins pour les Maçons initiés. En effet il est mort comme un simple mortel. Son corps qui renaît dans le Maître, a été placé entre l’équerre et le compas, les pieds situés à l’Est. Il n’est découvert que grâce au rameau d’acacia. Connaître l’acacia indique bien que l’on est initié aux mystères maçonniques. Il s’agit vraiment d’une mort initiatique où l’on meurt pour renaître de ses cendres vers une nouvelle vie.



C’est peut-être la même chose pour la résurrection du Christ. La résurrection de Jésus évoque le stade final d’une quête d’amour et de connaissance : c’est l’abandon d’un état ancien pour un état nouveau, plus lumineux. L’autre rive est atteinte.

Pour espérer renaître, il faut donc accepter de mourir. Il faut franchir le « mur de feu », avoir renoncé à soi-même : c’est là la principale épreuve.

Jésus est également le lien avec le Divin. C’est l’intermédiaire le plus haut, accessible aux mortels. Il s’adresse à tous en renaissant lui-même, après avoir délivré son message dont chaque homme doit faire le meilleur usage. Le Maître mythique est le symbole de la connaissance toujours renaissante. La connaissance est infinie, avec elle on ne peut qu’avancer et évoluer.


Dans l’ordre maçonnique, tout tourne autour de ce personnage mythique.

La source de ce mythe est, nous le savons, problématique. Dans la Bible, il n’est pas l’architecte du Temple, il en est l’accessoiriste : fondeur (I Rois, 7, 13) ou graveur (II Ch. 2,14). Spécialiste du bronze, il est censé avoir réalisé les colonnes J et B et la mer d’airain « La mer d'airain est un bassin circulaire en bronze disposé devant le Temple de Salomon, à Jérusalem, elle est décrite dans « 1 Rois 7 » et « 2 Chroniques 4 ». Le Maître-Architecte des francs-maçons est d’autant plus une création « orpheline » que, dans les premiers rituels des 3 grades, l’Architecte était Noé (Cf. le manuscrit Cooke, catégorie Anciens Devoirs datant de 1400 - 1410 (British Library, Cooke, Ms 23198).


La notion d’une connaissance infinie me fait penser que l’œuvre du Maître mythique ne peut être qu’une œuvre inachevée. Il est initié et devait donc mourir et renaître au travers des Maîtres. C’est cette œuvre inachevée que nous poursuivons plusieurs milliers d’années plus tard, par la poursuite de la construction du temple de Salomon qui nous est chère. L’œuvre de Jésus est également inachevée. Il nous a prouvé qu’il était l’envoyé de Dieu sur terre et que seule la foi pourrait permettre de poursuivre et de faire perdurer son œuvre. Ces notions communes d’œuvres inachevées expliquent les morts brutales et violentes de Jésus et du Maître mythique. Ils savaient que les hommes les empêcheraient de vivre et qu’ainsi ils ne pourraient terminer leurs missions et leurs œuvres. Ils laissaient ainsi aux hommes initiés, la responsabilité de poursuivre sans cesse cette œuvre et ainsi de porter et de transmettre la parole. Nous retrouvons également la notion de sacrifice dans la mort de Jésus et du Maître mythique. Le Christ s’est sacrifié et lors de la communion, il est dit « Prenez et mangez, ceci est mon corps, ceci est mon sang ». Du sacrifice, découle la sagesse. Le monde entier sera alors sauvé pour l’éternité. Jésus savait qu’il devait être arrêté et mourir pour ressusciter. Il avait d’ailleurs annoncé que l’un des apôtres le trahirait. Judas devait donc exister pour que l’Histoire s’accomplisse. De la même manière les trois mauvais compagnons devaient exister pour que la légende puisse également s’accomplir.


Le Maître mythique s’est également sacrifié en ayant conscience de l’aspect sacré de son acte. La tradition pourra ainsi perdurer et son enseignement sera perpétré au-delà de sa mort. Le Christ, quant à lui est divin, c’est un Dieu vivant, incarnant la complétude de la vie à la mort. Il est né, a vécu, est mort et ressuscité. Le Maître mythique est, selon le légendaire maçonnique, un humain qui a vécu et est mort en laissant le soin aux initiés de le faire renaître, revivre et de symboliser sa résurrection. Le mythe est donc ici celui de la réincarnation en esprit. C’est l’âme du Maître qui se réincarne dans le compagnon.

Légende, mythe, mystère, initiation, révélation, …. Il est prudent de bien respecter les significations particulières de ces notions, et d’éviter tout amalgame qui peut conduire à des confusions. Et si la lumière de leur apport vient à éclairer le cherchant, alors qu’il en déguste le fruit mais ne s’en attribue pas le mérite. Car l’esprit souffle où il veut, et la lumière peut surgir librement dans l’âme de chacun.

« Sache, ô mon fils que si un certain mystère t’est révélé, soit par ton propre effort ou grâce au conseil d’autrui, alors ne t’en adjuge aucun mérite, ni ne méprise ceux qui sont plus ignorant que toi… »

(Extrait du Traité du Puits, Obadiyah Maïmonide (1228-1265).



GL 11/2021.


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[1] Jésus dans la tradition maçonnique, rituels et symbolismes du Christ dans la franc maçonnerie française. Paris, Desclée, 2003,250 p. (bibliogr., annexes, glossaire) (coll. « Jésus et Jésus Christ » no 87). La légende d’H…m est abordée par des sources scripturaires (relatives aux Saintes Écritures), son usage dans les Anciens Devoirs (manuscrits Regius 1390 et Cook 1420), puis ses débuts discrets et tardifs dans la Maçonnerie spéculative avec de grands flottements dans l’interprétation. L’identification d’H…m au Christ est laissée à l’appréciation de chaque Maçon en fonction du milieu culturel dont il était issu. (Note de l’auteur).


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