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    Cahier Bleu n° 51. Initiation – Ésotérisme (2nde partie) : … et la Franc-maçonnerie dans tout ça ?

    • Photo du rédacteur: ITER
      ITER
    • il y a 6 jours
    • 6 min de lecture
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    © Steve Evans, Wikimedia Commons


    Voir Cahier Bleu n° 50 (première partie).


    Rappelons les trois caractéristiques fondamentales d’une société initiatique ; elle doit disposer :

    -       d’un projet, c’est-à-dire d’un objectif, d’une philosophie de contenu et d’action ;

    -       d’une méthode de transmission de son dépôt et de progression du projet ;

    -        de Maîtres Initiateurs.

     

    On dit, à juste titre, que la Franc-maçonnerie est une société initiatique fondée sur un ésotérisme réservé à ses initiés. C’est même une société à mission : celle de constituer une chaîne universelle d’hommes vertueux, éveillés, actifs pour leur bienfait, celui de leur prochain et du monde.

    On peut remarquer, par exemple, que la cérémonie de consécration d’une Loge, les cérémonies d’ouverture et de clôture des Travaux, sont des cérémonies clairement initiatiques. Et pourtant, elle ne présente pas, au sens strict, d’ésotérisme particulier puisqu’aucun secret n’y est communiqué. Il y aurait donc de l’initiatique en Franc-maçonnerie sans ésotérisme ?

    Qu’est-ce à dire ?

    C’est pourquoi, Il peut être utile de clarifier à la fois les trois caractéristiques fondamentales ci-dessus, ainsi que ces deux termes « initiation » et « ésotérisme ».


    L’initiation.

    -       Le projet

    Tout projet sérieux, qu’il soit matériel ou spéculatif, se caractérise ainsi : il doit être légitime, cohérent et incarné.

    Il n’y a pas de projet unique depuis l’expansion mondiale de la Franc-maçonnerie spéculative, née à Londres en 1717, sous la forme que nous pratiquons désormais.


    Légitime :

    o   Dans le contexte historique d’alors, les Modernes de Londres, n’avaient qu’un but : rassembler localement des hommes déchirés depuis de nombreuses années par des affrontements violents religieux et politiques, et globalement construire et mettre en visibilité dans le monde une société d’élites, hommes bien éduqués au comportement exemplaire, unifiée par l’existence liens fraternels à la surface du globe.


    Cohérent :

    Répondre au besoin de s‘élever civilement et spirituellement, de voyager et séjourner chez des personnes de confiance, unies par l’appartenance à un « même club » où elles seraient reçues et donc unifiées par les mêmes modes cérémoniels d’entrée et de progression dans le « club » : « member » puis « fellow ».

    o   Interdire tout sujet en loge susceptibles de créer de divisions contreproductives au projet de l’union fraternelle ; d’où l’interdiction formelle de tout débat politique ou religieux.


    Incarné :

    Un dépôt traditionnel, les mystères du métier de Maçon, et des Initiateurs habilités à le transmettre « d’âme à âme » et non par voie de lecture ou de ouï-dire.

    Sur le continent européen, assez rapidement, le projet initial s’est diversifié. D’une sorte de « club de gentlemen », la Franc-maçonnerie s’est muée, selon l’apparition de rites, ici, en « académies savantes », là, en foyers d’illuminisme ou de théosophie, et encore, en laboratoires d’idées pour le pouvoir en place. Donc, loin des rivages de l’intention de la Franc-maçonnerie spéculative native…

     

    -       La méthode.

    De ce qui précède, on comprendra que les méthodes de mise en œuvre du projet — ou raison d’être ou corpus organisé —ne sont guère restées la même, dès la fin du XVIIIe siècle.


    Schématiquement, les rites anglo-saxons (Anglais dont Emulation, Standard d’Écosse, York, et même Rite Français, quand il est bien compris, car il descend directement des rites des maçons dits « Modernes » de Londres —, sont restés conformes à leur application primitive : il s’agit de créer un esprit de travail entre bâtisseurs aux compétences interdépendantes. Par ce dernier terme, il faut considérer que chaque loge est un chantier de construction d’un édifice symbolique, que chaque membre d’une loge est considéré comme un ouvrier du chantier et que son travail doit viser à l’excellence pour permettre la spéculatifs, comme sur un chantier réel ! Et pour se perfectionner, on répète et on participe aux instructions des rituels.


    Autrement dit, la méthode de ces rites est le travail en commun.

    Dans d’autres rites, la méthode de travail consiste à faire des exposés sur des sujets, parfois même auto-choisis (!) et, selon les cas à étaler son érudition ou à « ouvrir son cœur » pour communiquer ses émotions. Il est clair que, hors du bénéfice de l’ésotérisme du rituel, la question de l’effet initiatique de la méthode peut être sujette à question.

    Quelquefois, de ce fait, la production initiatique, peut tourner à la contre-initiation, au sens de « ratage » de la création de liens fraternels, car la différence entre érudits et les autres, entre bons orateurs et les autres, entre bons écrivains (de « planches ») et les autres, etc., peut conduire à des frustrations voire des jalousies en loge, précisément parce que le travail en commun unificateur … n’existe plus.


    Enfin, un rituel particulier, le projet du Rite Écossais Rectifié repose entièrement, depuis la Chambre de Préparation, sur une doctrine (au sens de véritable corpus d’enseignement) : La réintégration des êtres dans leurs premières propriétés, vertus et puissances spirituelles et divines. Cette doctrine irrigue et vivifie ce Rite, en le scénarisant à tous ses grades et Classes ostensibles ou Secrète.

     

    D’où l’affirmation supra de la divergence des méthodes de travail au sein même de la franc-maçonnerie …

     

    -       Les Maîtres initiateurs.

    Là est peut-être la plus grande difficulté pour transmettre le dépôt ésotérique. Celui qui effectue la cérémonie d’initiation doit lui-même être un véritable et légitime « initiateur », Cette exigence incontournable suppose qu’il ait reçu légitimement cette qualité, dans les formes traditionnelles, et qu’il soit en mesure à son tour de diffuser une influence spirituelle complète, d’âme à âme, afin de rendre réceptifs les Frère. Il ne doit en aucun se considérer comme un « animateur de réunion », ni recherche l’approbation des moins instruits dans le rite, ni accepter e compenser la voie initiatique par l’épanchement des émotions. Les seules émotions légitimes sont justement celles que le Maître initiateur véritable est capable de produire par l’illumination intérieure provoquée par la sensibilisation des corps, des âmes et des esprits au langage des symboles.

     

    L’ésotérisme.

    Pour qu’il y ait infusion de l’ésotérisme en soi, il faut trois autres conditions impératives :

    -       L’ésotérisme ne prend et diffuse sa puissance initiatique en acte que s’il est communiqué par un rituel … initiatique, … et non par un rituel altéré où, pour ne pas déplaire ou s’abaisser au niveau de la moindre compréhension, où des termes devenus « gênants » ou par remplacement des passages que l’on ne comprend plus, ont été changés ou supprimés.

    Dans ce dernier cas, celui de rituels altérés, les aspects ésotériques peuvent être encore présents, si l’on ne les a pas édulcorés ou enlevés ; mais ils ont perdu toute puissance initiatique, ils sont devenus des avatars inactifs pour l’initiation, des coquilles vides.


    -       Les séances d’instruction sont absolument fondamentales pour écouter les Maîtres Initiateurs et laisser venir et pénétrer en soi l’apport spirituel des outils initiatiques, afin de progresser dans la lumière de la vérité, tant en Maçonnerie que dans le monde extérieur. À nouveau, il ne faut pas perdre de vue que les outils de l’entraînement ésotérique doivent être adaptés en fonction des capacités de l’étudiant.

    Un dicton oriental écrit que les outils de l’orfèvre, dans les mains d’un cordonnier, sont pareils à des graines semées dans le sable. Et les outils du cordonnier dans les mains du fermier sont semblables à de la paille offerte à un chien, à des os donnés à un âne.

    -       Les récipiendaires de l’ésotérisme doivent être correctement préparés « dans leur cœur » à interpréter correctement le langage symbolique, parce que sans réceptivité et terrain favorable, point d’effet ésotérique.

    Il peut donc y avoir initiation sans forcément ésotérisme, mais il ne peut y avoir d’ésotérisme, au sens strict, sans initiation.

    En résumé.

    La mission de la Franc-maçonnerie n’est nullement de diffuser des savoirs, et encore moins la Connaissance. Sa vocation, « si l’on entend bien l’Art », est d’aider à faire émerger, développer, perfectionner en chacun de ses membres, la lumière de l’esprit, la faculté de penser par soi, de se libérer de toutes sortes de passions mauvaises et de de toutes sortes d’influences nocives. Ainsi chacun peut avancer, à son rythme, et selon ses propres capacités, sur le chemin pouvant le mener à la sagesse.

    Une Loge au travail est comme une vision de toute la vie, de toute la création, vues sous une forme nouvelle et collective dans les sociétés initiatiques. L’ouvrier est caché dans l’atelier, caché par le travail qui a, pour ainsi dire, tissé une toile autour de lui. L’atelier est le lieu de la vision. Le monde, c’est le lieu de l’obscurité ; mais au-delà de la loge l’ouvrier ne peut user du voile de lumière qu’en association avec le reste de la création. Ses pouvoirs et son être même sont unis par un nouvel ensemble de rapports.

    L’ésotérisme maçonnique jette un pont entre la vie mondaine et une transmutation de la conscience d’une manière qu’aucune forme littéraire produite à ce jour n’a pu égaler.

    L’initiation est donc un processus, l’ésotérisme, dépôt de secrets nécessitant des clés d’interprétation pour les activer et libérer en acte leur puissance initiatique.


    Quelques citations glanées çà et là :

    ·       Initiation et Ésotérisme sont comme les deux ailes d’un même oiseau (TCF Jean Drouffe).

    ·       Le bénéfice spirituel qu’un individu reçoit de la Maçonnerie est proportionnel au désir et à la capacité pour en comprendre son sens interne.

    ·       Quand l’homme inadéquat utilise des moyens corrects, les moyens corrects travaillent à l’envers. (Tao).

    ·       Un véritable initié est un homme responsable de lui-même, de ses pensées et de ses actes, vivant toujours en étroite communion avec la grande âme de l’univers, obéissant aux lois divines et agissant en parfaite harmonie et paix avec tous les êtres dans tous les domaines de l’existence. Si chaque être humain se décidait à allumer la lumière, le monde brillerait comme mille soleils. (Fermin Vale Amesti).

    ·       Dans une société initiatique comme la Franc-maçonnerie, nous ne faisons rien d’autre que remplir nos sacs et nos greniers intérieurs, c’est-à-dire notre intellect, notre cœur, notre âme et notre esprit, de cette lumière vivante descendue de là-haut, qui nous aide à chasser nos ombres intérieures.

     

    ITER, 09/2025.

     

     

     


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