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Cahier Bleu n° 35: « Mystères et privilèges » de l’honorable société de la Franc-maçonnerie.


« […] un candidat […] se présente aujourd'hui librement et de son plein gré, […] pour solliciter humblement d'être admis aux mystères et privilèges de la Franc- maçonnerie. » (Rites Émulation et Standard d’Écosse).

Cependant, ceux qui ignorent ce qu’est vraiment la Franc-maçonnerie et qui en parlent sans rien en savoir, en répandent souvent une image qui ne lui correspond pas.

Rétablissons la réalité.


La Franc-maçonnerie est un mouvement historique ayant son propre caractère :

- une raison d’être de construction d’une fraternité universelle ;

- le recours à un corpus de symboles et secrets faisant référence aux métiers de Maçonnerie, divulgués aux initiés par voie de cérémonies traditionnelles de réception, sans jamais avoir fait appel aux savoirs secrets de type « mystériques[1] » qui ne la concernent pas ;

- l’appropriation des signes d’investitures appartenant à certains anciens ordres patriarcaux, sacerdotaux ou chevaleresques, jalousement conservés par eux (titulatures, blasons, et autres objets identitaires), attestant ainsi le glissement des cercles fermés vers des groupes semi-publics : les loges, dont l’admission est ouverte à tous ceux qui en ont le désir et les dispositions personnelles requises de liberté et de bonne réputation.


Les cérémonies d’admission, les instructions maçonniques, les mystères et secrets constituent un spectacle initiatique, un enseignement à fond philosophique, des outils d’élévation morale et spirituelle, et qui sont autant de lumières de l’esprit, que les initiés vont explorer et dont ils vont débattre, qu’ils vont mettre en question, à l’image des sages de l’Antiquité.

À l’instar des associations fondées sur le secret, mais cela seulement sur leur modèle, la Franc-maçonnerie est organisée en une hiérarchie strictement initiatique et non administrative ou d’autorité, comportant des échelles de grades.

La fonction spécifique de la Franc-maçonnerie est de sélectionner, au travers d’une série d’épreuves particulières et traditionnelles, une minorité d’élus aptes à bénéficier d’enseignements spirituels non dogmatiques de plus en plus élevés, peu accessibles au commun.

Mais contrairement aux initiations anciennes à mystères, par lesquelles les classes privilégiées par la naissance, la position sociale ou les réseaux repliés sur eux-mêmes, se voyaient conférer une habilitation au pouvoir, la Franc-maçonnerie se situe purement sur un terrain dans lequel l’initiation ne peut apporter qu’une transformation éthique, morale et spirituelle, sans incidence politique, religieuse ou sociale.

À tous ceux qui ont le désir sincère de connaître les bienfaits de l’initiation et qui travaillent dans un esprit de fraternité universelle et de progrès individuel, la Franc-maçonnerie offre, sans restriction de naissance, de rang ou de religion, la promesse d’une élévation bienheureuse, ce qui était à l’origine un privilège exclusivement de classe.


Cependant, en dépit de cette démocratisation d’un privilège autrefois strictement réservé à quelques « happy few », l’initiation maçonnique traditionnelle continue de se placer en dehors de toute publicité. Elle réserve cette lumière qui ouvre l’accès à une vie intérieure intense, compatible avec sa confession de foi religieuse, son état professionnel et les lois de l’État, aux initiés qui s’extraient eux-mêmes de la condition ordinaire. L’initiation maçonnique devient ainsi pour eux une puissance spirituelle visant à transformer l’individu indépendamment de l’ordre social, à réaliser en lui une sorte de nouvelle naissance qui l’arrache au statut commun et le fait accéder à un plan de vie différent. La Franc-maçonnerie se situe ainsi dans une voie de sagesse permettant de transformer l’homme, du dedans, de l’élever à une condition supérieure, d’en faire un être unique et unifié en lui-même, bienveillant et bienfaisant pour ses semblables.

Pour ce faire, la Franc-maçonnerie substitue aux rites mystériques d’initiation d’autres épreuves sur le long cours : une règle de vie, un chemin d’ascèse, une voie de recherche intérieure, et, par-dessus tout, le sentiment de faire partie d’une chaîne de fraternité bénéfique à l’humanité, par son esprit constructif « sans frontières ».


Ce sont là les véritables mystères et privilèges de l’honorable société de la Franc-maçonnerie.


« Permettez-moi de vous féliciter d'avoir été admis comme membre de notre ancienne et honorable Institution. Elle est ancienne, en effet, car elle a existé de temps immémorial. Elle est honorable, il faut le reconnaître, car elle contribue à rendre tel celui qui suit ses enseignements. Aucune Institution, en effet, ne peut se vanter d'être établie sur des bases plus solides que ne l'est la Franc-maçonnerie, puisqu'elle est fondée sur la pratique de toutes les vertus morales et sociales, et, telle est la considération dont elle jouit que, dans tous les temps, des monarques eux-mêmes ont cultivé notre Art et n'ont pas cru déroger en échangeant le sceptre contre la truelle. Ils ont protégé nos mystères et se sont joints à nous dans nos assemblées[2]. » (Rite Émulation).





G.L.I.F., 08/2022

[1] Il a existé dans l’Antiquité une grande diversité de rites mystériques : orphiques, dionysiaques, gnostiques, mystères d’Éleusis, d’Isis et d’Osiris, etc. Leurs pratiques, fort différentes entre elles, sont le plus souvent polythéistes, personnification d’idées abstraites (vertu, sagesse, foi, concorde, maîtrise de soi, etc.), pratiques bachiques, orgiaques, transes, actes sacrificiels, etc. [2] Plusieurs rois de France (de Louis XV à Louis-Philippe) sont réputés avoir été membres de la Franc-maçonnerie ou l’ont protégée ; et encore aujourd’hui plusieurs monarques régnants ou de rang royal en sont membres, certains en sont même Grands Maîtres.

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